Prague,1938, la guerre inévitable se prépare en Europe, sous l'égide d'Hitler, "le Diable en personne". On ne croit pas si bien dire, car le diable est sur Terre, il est bloqué à Prague et seule une jeune fille juive - Coral - peut le voir. Cette spécificité serait liée à son père, le rabbin Loew, expert en exorcisme. Une cohabitation s'installe alors entre la jeune fille et le diable, mêlée de méfiances mais également de complicités inéluctables entre eux pour affronter ce qui les attend. Coral est convaincue que son père est de connivence avec des forces obscures, pourtant il est le dernier homme capable d'invoquer le Golem médiéval, un soldat de boue qui pourrait repousser Lucifer dans les entrailles de la Terre. Coral finit par s'enfuir, rejoint un cirque à Prague comme diseuse de bonne aventure et découvre en chemin que le Diable est toujours à ses trousses... Littéralement. L'histoire oscille entre le fantastique et l’historique, avec des thèmes de paternité, d’adolescence et d’identité.

Nous avons une fois de plus été époustouflé par la virtuosité graphique de Homs qui nous livre ici des planches de toute beauté qui sont, en plus, d'une lisibilité sans faille. C’est un plaisir de croiser différents hommages au film « l’exorciste » ou aux œuvres du célèbre peintre néerlandais Jérôme Bosch. Côté narration, c'est très riche. Le contexte historique n'est pas qu'un prétexte mais a une importance décisive dans le destin de la jeune héroïne Coral. Elle est d'ailleurs loin d'être aussi naïve qu'on pourrait le penser au premier abord et réserve bien des surprise à son antagoniste maléfique !  L’histoire est intéressante avec de très bonnes idées et mêle contes médiévaux, anecdotes historiques, fables célèbres, mélodrame familial et un dilemme apparemment insoluble. Entres autres l’apparition de Hitler aux côtés de Satan y est glaçante, ou le bref passage de la jeune Coral dans l’enfer est réellement effrayant. L’atmosphère y est  souvent inquiétante, original, très esthétique. La structure kaléidoscopique pourrait un peu perturber mais il ne faut pas s'arrêter là, le coup de théâtre final s'avère grandiose.